‘’Exponentielle’’ est le nouveau concept de danse que le chorégraphe ivoirien Sanga Ouattara a amené à cette 12ème édition du Marché des arts du spectacle d’Abidjan (Masa). Il malaxe formules algébriques et géométriques avec l’ondulation de son corps. Très contemporain.
Quand les mathématiques prennent possession de l’être humain, cela devient un enchainement de vibrations. Sanga Ouattara le sait si bien et en fait la démonstration. Il n’a pas la craie en main face à un tableau noir comme un enseignant. Il donne à vivre plutôt la bête noire, le programme exponentiel des maths par sa création artistique. ‘’Exponentielle’’, une fonction complexe qui a fait baver plus d’un en classe Terminale des séries scientifiques.
Le spectacle s’ouvre par un homme filiforme statique, le regard fixé sur un objectif comme s’il cogite profondément. Debout, l’ombre adossée au mur tel un assistant dans la réflexion. Puis ses doigts se mettent à bouger les uns après les autres, sa tête aussi, ses pieds puis tout son corps. Il prend possession de tout l’espace et son ombre au fur et à mesure, se multiplie, se démultiplie. La danse et l’écriture s’imbriquent.
Sanga Ouattara se déploie sur la scène avec des mouvements cascadés, endiablés, les doigts arpentant des gestes d’écriture. Silencieux au départ, il commence à réfléchir à voix basse, à haute voix puis dans une détonation éblouissante comme les rapides d’une chaîne de montagnes.
Tout d’un coup, l’ombre qui l’accompagne dans sa résolution du problème fait place à de troublantes formules mathématiques. C’est le branle-bas. Le spectacle devient plus complexe. Complexe comme la résolution d’un calcul d’exponentielle. Les chiffres, les formes, les nœuds, les dénouements, les complications, la dé-complication… tout progresse dans une constante évolution à n’en point finir.
Ainsi, Sanga a construit son jeu afin d’emporter le spectateur dans un monde scientifiquement exponentiel. Il fait donc ce clin d’œil aux mathématiques pour faire comprendre au public et à tous que les mathématiques sont à tous les niveaux de la vie humaine, de manière consciente ou inconsciente.
Diplômé de l’Institut national supérieur des arts et de l’action culturelle (Insaac) en Côte d’Ivoire, Sanga Ouattara a inventé le concept de la danse exponentielle pour créer le rapport entre les mathématiques et la vie humaine, la vie de tous les temps. C’est sa cinquième création et le deuxième concept qu’il invente dans sa recherche d’une singularité chorégraphique pour faire voyager les gens dans son univers.
Au départ, il a impliqué uniquement son ombre dans la création. C’est plus tard qu’il a compris qu’il pourrait y aller avec l’image animée montrant cette complexité des chiffres et des lettres qui se mélangent par la fonction exponentielle.
Qu’est-ce que cela crée dans la tête du spectateur ? Qu’est-ce que cela crée dans le corps du danseur qui est dans le rythme, dans l’espace, un peu comme dans la vie de tous les temps ? A chacun sa réponse.
Fortuné SOSSA