La pratique de la scarification raciale fait partie de la tradition béninoise en particulier et de l’Afrique en générale. Pour Léon Bio Bigou, enseignant-chercheur au département de Géographie à l’Université d’Abomey-Calavi, la scarification est un signe communautaire qui constitue une « marque de distinction ».
Depuis des siècles les cicatrices raciales sont utilisées en Afrique pour indiquer l’héritage d’une personne. Que peut-on retenir du fondement d'une cicatrice raciale ?
Dans nos traditions en Afrique, il y a plusieurs types de culture avec leurs pratiques. Et par rapport à la scarification raciale c’est d’abord une certaine marque de distinction pour pourvoir identifier les individus d’une société par rapport à d’autres. Les scarifications raciales sont des signes appartenant à des communautés.
La scarification raciale est un élément d’identification. Elle permet de lire mécaniquement l’ethnie d’une personne sur la peau. Professeur, au-delà de la simple identification, la scarification a-t-elle une autre fonction ?
A l’intérieure d’un même groupe ethnique, il y a qui en ont de cicatrice raciale et aussi d’autres qui n’en possède pas. Parce que tout s’simplement l’Africain ne fait jamais rien au hasard. C’est ainsi que vous voyez par exemple un père qui a une cicatrice et dont ses progénitures n’en ont pas. Alors tout dépend de la manière dont vient un individu. Dans chaque communauté au niveau de chaque culture, il y a des regards différents par rapport aux phénomènes sociaux. Par exemple lorsque vous voyez dans une famille où ni le père, ni la mère n’ont pas de cicatrice ou soit l’un en a l’autre n’a pas, il est souvent rare que leurs progénitures soient scarifiées. Tout ça parce que pour l’Africain déjà depuis la conception de l’enfant il est préoccupé de l’avenir avant même sa naissance. Et c’est en cela, selon certaine pratique de consultation, il est pour que cet enfant là puisse être ci ou ça, il faudrait lui faire telle marque.
Stigmatisée comme un outil inutile à l’ethnologie cette pratique de la scarification est vouée à disparaitre et aussi certaines communautés ethniques ont commencé à lui tourner le dos. Quelles sont les raisons ?
Il n’y a rien qui n’évolue ! Tout évolue et c’est dans cette dynamique qu’on peut s’adapter d’une manière ou d’une autre à l’évolution. Si tel que je le dis si l’origine de la cicatrice distinctive était liée à l’individu à qui on a eu à faire cela, pourquoi alors les autres individus qui n’ont pas cette caractéristiques, juste parce que chaque individu ethnique a son genre. D’autre en font puisque c’est peut-être à un moment donné de leur histoire qu’on a commencé à faire cette scarification, parce que par rapport à son avenir, par rapport à son existence, il fallait cela. Mais les enfants de ce dernier une fois qu’il sera marié, n’auront pas les mêmes problèmes que le père ou la mère, donc ces enfants ne seront pas scarifiés. Or dans d’autres circonstances on dira qu’on a fait à leur père donc il faudrait qu’on fasse aux enfants également. Et si avec l’évolution on constate que finalement si on avait fait à leur père pour certaines raisons, et ces connexions ne sont pas valables pour les enfants ; inutile alors d’en faire cela. Voilà comment les gens sont en arrivés à faire dos à la pratique de scarification. Ensuit avec le monde que nous appelons le monde de la modernité où chacun à sa conception de cette modernité. Il y a des cas où parce que vous avez une cicatrice ont vous interdit de participer à certaines activités. Et aussi, lorsque vous avez à faire à des gens qui ne voudrait pas qu’on les situe par rapport à un groupe ethnique donnée et à un groupe social donnée. Donc la neutralité totale, même si les parents l’avaient, s’il a la possibilité et même s’il en avait, il ne va pas en faire à ses enfants. Tout dépend de la manière dont les gens comprennent l’évolution.
Un constat est fait en générale où dans certaines familles de nos jours, c'est à l'aîné (fille ou garçon) seul qu'on fait de cicatrice. Que dites-vous à ce propos ?
Si dans une famille le père a une cicatrice et on a cherché à savoir les raisons pour lesquelles on lui a fait cela et que les enfants nés après ne sont pas confrontés aux mêmes problèmes que le père, alors on n’a pas besoin de continuer la pratique. Dans le contexte culturel Bariba, lorsqu’une femme fait des mort-nées ou quand les enfants naissent ils ne survivent pas, une fois, deux fois, et cela commence par inquiété, pour alors arrêter donc le phénomène, il faudrait faire tel chose et pour la troisième grossesse lorsque le bébé va n’aitre on demande des rituels dans lesquelles figurent les cicatrices. On est alors obligé de le faire pour arrêter tout autres dégâts. Mais ce dernier, lorsqu’il aura des enfants après, il n’est pas obligé de leur faire de cicatrice. Ce qui est valable pour un quelconque individu n’est pas valable pour l’autre dans tous les cas, car ils ne sont pas nés dans les mêmes conditions. Peut-être que celui-ci appartient à un système social et on lui dit tant qu’on n’aura pas faire la cicatrice la femme perdra toujours ses enfants. Mais dans d’autres cas il faudra le maintenir pour toute la famille.
La scarification exige une plus grande prudence à cause des risques d’infections qui sont possibles au moment de l’acte et aussi pendant la période où les plaies ne sont pas encore refermées. Est-ce que la pratique pose des problèmes de santé ?
Oui, cela peut arriver. Des problèmes de santé peuvent surgir à certains niveaux à cause d’un mauvais entretien de la cicatrice.
Propos recueillis par Dodjivi Emmanuel AMOUSSOU