Scénariste, réalisateur, assistant réalisateur, Arcade Assogba est un jeune cinéaste béninois diplômé de l’Institut Cinématographique de Ouidah (Ico). Et depuis, il essaie de prendre sa place parmi les professionnels du septième art par la réalisation de courts métrages qui reçoivent d’excellents accueils. ‘’Zanklan’’, sa fiction vient de le hisser à la cour des grands.
La Marche Républicaine : Arcade Assogba, vous revenez d’un festival de cinéma ‘’Dakar Court’’ au Sénégal. Parlez-nous-en.
Arcade Assogba : ‘’Dakar Court’’ est un festival qui a de fortes chances de devenir le rendez-vous incontournable du court métrage en Afrique. Les jeunes qui l’organisent sont animés d’une volonté farouche de bien faire les choses. Heureusement pour eux, ils ont des gens qui les accompagnent au niveau de tout l’aréopage institutionnel à même de soutenir le cinéma dans un pays notamment le Sénégal.
C’est un festival qui n’est qu’à sa deuxième édition mais qui a mis, comme dit-on, les grands plats dans les petits pour faire une sélection officielle de onze films à l’échelle du continent et de la diaspora pour une compétition panafricaine. Mais à côté, il y avait d’autres programmes à savoir, des courts métrages français, des courts métrages francophones. Par exemple, il y avait un programme spécialement conçu par la chaîne de télévision A+ dans lequel j’ai retrouvé l’un des films de Royal Link du Bénin. Cette structure a eu à faire un film pour A+ sur les classes d’école.
Vous étiez à Dakar Court avec lequel de vos films ?
C’est le film Zanklan qui a été retenu dans la sélection officielle de ce festival. Ce qui nous a surpris parce que ce n’est pas évident. Il est vrai que nous avons envoyé le film parce qu’il faut toujours essayer et c’est ce que nous avons fait. Au fait, les festivals dans le monde ont généralement des accompagnateurs qui, eux-mêmes, sont déjà en amont de certains films et souvent quand ils viennent sur des événements qu’ils accompagnent, on s’attend logiquement à ce que les films qu’ils avaient déjà soutenus en amont se retrouvent dans le palmarès et même dans la sélection. Et nous qui venons avec un film produit par Kitikili Film en coproduction avec Artisttik Africa, ce n’était pas évident pour nous. Artisttik Africa n’est pas un habitué de production de film, c’était notre premier coup d’essai. Kitikili Film de même. C’est d’ailleurs la petite boîte de production que j’ai créée et qui n’a produit jusque là que deux de mes courts métrages même si nous avons beaucoup d’ambitions.
Le même film Zanklan faisait partie, presqu’aux mêmes dates, de la sélection officielle des Rebi@p (Rencontres de Belles Images Africaines de Parakou), ville béninoise à statut particulier située à 430km de Cotonou. Mieux, le film a remporté le deuxième prix du festival. Comment avez-vous reçu cette nouvelle depuis Dakar où vous séjourniez encore au moment de la délibération de Parakou ?
Très honnêtement, je ne vous cache pas ma joie. Je suis heureux parce que c’est comme on dit qu’il y a quelque chose d’inattendu qui arrive parfois, c’est vraiment le cas. Les Rebi@p pour moi ont une valeur assez importante. J’ai fréquenté des classes du cours primaire à Parakou. J’y suis revenu pour le second cycle au lycée Mathieu Bouké où j’ai décroché le Baccalauréat. Je suis promotionnaire de l’actuelle ministre chargée de l’Economie numérique. Elle faisait la série C et moi la série littéraire.
Franchement je voulais aller à Parakou. Il se fait que quand ils m’ont envoyé l’invitation je le leur ai dit très clairement que je suis désolé je vais aller à Dakar. Je vais avoir bientôt 40 ans et je n’étais jamais allé au Sénégal. Je suis allé en France, en Belgique et ailleurs dans le monde mais je ne connais pas Dakar qui est à côté. Du coup, je n’avais aucune raison de laisser tomber l’opportunité que m’offrait ‘’Dakar Court’’ de découvrir le Sénégal.
Et donc j’étais encore à Dakar quand un collègue m’écrit : « Félicitation grand frère, vous venez de gagner aux Rebi@p le prix Mgr Isidore de Souza. » J’ai pensé d’abord qu’il était entrain de jouer avec moi. Et quelques instants après, je commence à recevoir des messages de félicitations et d’encouragement sur divers réseaux sociaux. Je suis très heureux. Franchement. Je suis heureux que Parakou ait vu ce film. Je suis heureux que les gens aient compris ce film. Ce n’est pas toujours évident parce que c’est un film assez complexe. Je suis heureux parce que c’est ma ville qui me porte. Je suis heureux parce que ce sont des aînés et pas des moindres comme François Sourou Okioh qui m’ont reconnu un mérite. Je suis heureux parce que des amis de partout me félicitent pour cela.
Comment est né le projet de la création du film Zanklan ?
J’étais allé aux études en France pour faire un Master en sociologie parce que pendant ma formation diplomante en cinématographie, l’un de nos professeurs nous disait qu’on ne peut être un bon cinéaste sans connaître la sociologie. De retour de la France, j’ai tourné deux courts métrages, le premier avec mon téléphone portable sous le titre ‘’La traversée’’ qui a eu plein succès en festival. Le film est allé au Festival international des cinémas différents et expérimentaux de Paris. A la fin du festival, les organisateurs m’ont, de façon généreuse, demandé si j’étais d’accord pour qu’ils distribuent le film. Ce que j’ai accepté et nous avons signé un accord à cet effet. Donc ce sont eux qui distribuent le film ‘’La traversée’’.
C’est juste derrière ‘’La traversée’’ que j’ai tournée ‘’Zanklan’’ qui est une fiction, la première que j’ai produite avec ma propre boîte de production créée depuis 2012 avec mes premiers salaires au cinéma sur des films comme celui de Sylvestre Amoussou. ‘’Zanklan’’, c’est intraduisible ! On va dire « nuit séparée » ou « nuit épurée ». Je suis arrivé à un moment où je me dis : « Le brouillard est terminé ».
Propos recueillir par Fortuné SOSSA
Encadré : Filmographie d’Arcade Assogba
Au titre de réalisateur
- ‘’ZanKlan’’, Fiction court métrage, 9 min, Kiti-Kili Films/Artisttik Africa, Bénin - 2018
- ‘’La traversée’’, Performance, documentaire court métrage, 11min 28 sec, Kiti-Kili Films, Bénin - 2018
- ‘’Braves de la route des esclaves’’, Documentaire court-métrage - 6 min, Quintessence / Tabou-Tabac Films, Bénin - 2008
- ‘’Miel et légumes pour Gama’’, Documentaire - 26 min, Acoopa (Lycée Agricole de l'Oise), Bénin/France - 2007
- ‘’La bague magique’’, Fiction (Film d’école) - 23 min 40 sec, Quintessence / Tabou-Tabac Films, Bénin - 2006
Au titre de 1er assistant réalisateur
- ‘’L’Orage africain’’ - Un continent sous influence, de Sylvestre Amoussou, fiction – 90 min – Koffi Productions SARL, Bénin – 2015
- ‘’Un piège adorable’’, de Jean-Paul Amoussou, fiction – 90 min – Bazar Films Productions, Bénin - 2014
- ‘’Orillas’’, de Pablo César, fiction – 96 min - Pablo César Producciones / Direction nationale de la cinématographie du Bénin – Argentine/Bénin - 2011
- ‘’Un pas en avant – Les dessous de la corruption’’, de Sylvestre Amoussou, fiction – 105 min – Koffi Productons / Tchoko Tchoko 7e Art, France / Bénin – 2011
Au titre de 2ème assistant réalisateur
- ‘’Pim-pim tché – Toast de vie !’’, de Jean Odoutan, fiction - 86 min – Tabou-Tabac Films/45RDLC - France / Bénin – 2009
Au titre 3ème assistant réalisateur
- ‘’Adu’’, de Savador Calvo, fiction Long métrage – Ikiru Films, Espagne – 2019 (en post-production) Directeur de production (au Bénin)
- ‘’Calypso rose, la lionnesse de la jungle’’, de Pascale Obolo, Documentaire – 85 min - Dynamo Productions – France – 2011
Au titre d’assistant de production
- ‘’Das Schiff des Torjagers’’, de Heidi Specogna, Documentaire – 94 min – Teamworx – Allemagne – 2010
- ‘’Africa is rich’’, de Michael Lee, Documentaire – 90 min – Cievra/Mahala Empowerment Media – Bénin/Afrique du Sud – 2006
- ‘’If you built it, they will come’’, de Michael Lee, Docu-Fiction – 90 min – Cievra/Mahala Empowerment Media – Bénin/Afrique du
Sud – 2006.