‘’Mon portrait sur ton visage’’ est le nom que l’artiste camerounais Joseph-Francis Sumégné donne à son œuvre. Une sculpture d’assemblage des restes d’engins motorisés qui fonctionne, à la fois, comme une installation et un objet utilitaire.
L’œuvre de Joseph-Francis Sumégné orne impérativement la piscine de la Villa d’Anfa à Casablanca. Elle attire le visiteur comme d’une force magnétique. Impossible de ne pas l’apercevoir. Difficile de se retenir de s’en approcher. Difficile de s’empêcher d’avoir un frisson. Difficile d’en avoir un regard de consternation.
A première vue, l’œuvre communique l’horreur, la terreur, le refoulement. L’œuvre donne l’impression d’être un engin de guerre, une redoutable arme dévastatrice. L’indicatif ‘’No love = no peace’’ griffé sur sa face, de façon très visible, renvoie tout de suite à cette hostilité. Le déchiffrage rapide de l’inscription ne permet même pas d’intégrer l’indice de la comparaison. Tellement le ressentiment est instinctif qu’il cache à la vue le signe ‘’égal’’.
Mais cette lecture de l’œuvre de l’artiste camerounais à cette exposition panafricaine ‘’Prête-moi ton rêve’’ est bien erronée. Sur l’œuvre est bien inscrite ‘’No love no peace’’ avec le signe d’égalité. Ce qui se traduit de l’anglais en français par « Sans amour pas de paix ».
Toute la clé d’entrer dans l’œuvre se trouve à ce point : sans amour, pas de paix. Cette pièce gargantuesque se révèle alors être une apologie de l’amour. En effet, le monde est fragmenté par des tensions permanentes sur les tous les continents, dans tous les pays. Des tensions qui sont loin d’être le monopole de l’Afrique.
Toutefois, les tensions ne sont pas de la même taille d’un pays à l’autre, d’un peuple à l’autre, d’un groupe ethnique à l’autre, d’un individu à l’autre. Mais, petite ou grande, une tension est à l’antipode de la production de l’amour pour que règne la paix.
C’est pourquoi, Joseph-Francis Sumégné vient poser la problématique à travers cette œuvre d’une singularité exceptionnelle. La singularité ici se trouve dans la double fonction de la pièce : œuvre artistique et objet utilitaire. C’est à la fois une pièce bonne pour domicilier majestueusement dans un musée d’arts contemporains mais également un fauteuil surmonté d’une sculpture de tête humaine coiffée au look de l’artiste.
Joseph-Francis Sumégné donne d’ailleurs comme nom à son l’œuvre ‘’Mon portrait sur ton visage’’. Extraordinaire ! L’œuvre porte fidèlement son visage. Et comme ce visage entend communiquer l’amour, rien que l’amour, toute personne qui pose ses fesses dans ce fauteuil entre dans sa complicité avec l’amour. Du coup, ce regard pointé sur le vide va à la conquête de l’Homme. L’Homme, qui qu’il soit, où qu’il se trouve pour qu’il vienne partager avec l’artiste son rêve, celui du monde d’amour et de paix.
« Il faut aller chercher l’Homme où il se trouve, insiste Joseph-Francis Sumégné. Son esprit marche partout, sur les montagnes, sur les chars d’assaut… Il faut aller le chercher partout pour le ramener à la raison. »
Fortuné SOSSA