Les expositions photographiques restent en place pour soixante jours dans la capitale malienne. Bien que le festival de la douzième édition des rencontres de Bamako se conjugue désormais au passé, les expositions se poursuivent jusqu’au 31 janvier 2020.
Douzième édition, douze sites d’exposition, vingt-cinq ans d’existence. Bamako brille aux mille feux de monstration de photographie et vidéo d’art d’artistes africains. Bamako se présente comme une destination privilégiée sur le continent actuellement. La capitale s’est parée de sa robe biennale tout feu tout-flamme. Beaucoup de colories, de lumières intenses et d’expressions artistiques. La forte intensité de la lumière a fait disparaître la peur. Toutes les formes de dérive idéologique sont vaincues. La circulation est fluide dans la ville.
Les œuvres sont à découvrir au Palais de la culture Amadou Hampâté Bâ, au Musée national du Mali, au Conservatoire des arts et métiers multimédia Balla Fasseké Kouyaté, au Musée du district de Bamako, au Mémorial Modibo Keita, à la Galerie Medina, au Lycée de jeunes filles Ba Aminata Diallo, au Cinéma El Halal, au Blonba, à l’Institut français du Mali, dans des espaces publics et maisons de familles. C’est une innovation du directeur artistique de cette édition de la Biennale, le docteur Bonaventure Ndikung, illustre commissaire d’exposition originaire de la région anglophone du Cameroun. Mais pour que les visiteurs ne s’égarent point, le Délégué général des Rencontres, Lassana Igo Diarra a fait confectionner un plan de la ville de Bamako qui situe clairement chaque site d’exposition.
Ainsi, la ville déborde de charme. De part et d’autre, ça bouge. De part et d’autre, il y a à nourrir les yeux à satiété, il y a à nourrir les émotions, les sensations, les élucubrations. Bamako est plein de tendresse et d’orgueil aussi. Bamako respire l’image, de belles images qui mettent en dialogue photographes illustres et émergents, portraits et paysages, images dynamiques et statiques, mélange de techniques photographiques et picturales, techniques anciennes et nouvelles de photographie, l’argentique et le numérique... les œuvres des artistes disposées en lien avec les espaces choisis soigneusement pour la circonstance.
Courants de conscience
« Réfléchir sur la philosophie de notre temps, les relations entre les êtres humains mais surtout entre Africains, entre l’Afrique et ses diasporas. » C’est ainsi que le Directeur artistique justifie le choix du thème général de la Biennale. « Le système capitaliste, clarifie-t-il, nous pousse à être des individualistes, à oublier nos sociétés. » Or, l’individu existe dans une multiplicité. Bonaventure Ndikung illustre cela par une citation d’Amadou Hampâté Bâ pris dans ‘’Les pensées de civilisation africaine’’ : « Dans le concept bambara et peuhl, l’individu est une complexe coagulation des êtres différents. »
Lors de la cérémonie officielle de lancement de la Biennale le 30 novembre, le Président de la République malienne expliquait que « le terme courant renvoie à des bruissements, des déplacements, des changements de direction, bref à toute une politique du mouvement, à l’identité visuelle mais aussi sonore ». Pour Ibrahim Boubacar Kéita, « il n’est pas étonnant que cette réalité aux multiples identités et requérant de cet fait une approche holistique ait été abordée à plusieurs reprises dans l’histoire de la Biennale ». Il ajouta : « Plus aujourd’hui qu’hier, il n’est rien de plus difficile à représenter que ces courants physiques, intellectuelles, spirituelles qui informent et parfois déforment notre humanité. Rien n’est plus difficile à cartographier de manière définitive que ces mouvements qui peuvent sauver ou détruire. »
Ce n’est pas un hasard si le Président Ibrahim Boubacar Keita est le Coordonnateur de l’Union Africaine pour les arts, la culture et le patrimoine, une distinction qu’il porte comme un flambeau pour le rayonnement artistique et culturel du continent. Et il en donne la preuve avec l’organisation réussie de cette douzième édition des Rencontres photographiques panafricaines couplée avec la célébration des vingt-cinq années d’existence de la Biennale.
Mme Ramatoulaye Diallo NDiaye, Ministre de la culture du Mali ne manquera pas de le témoigner. Le Président Ibrahim Boubacar Kéita contribue à « réécrire l’histoire au temps présent et à faire de nos cultures, de nos arts et de nos patrimoines un viatique pour l’avenir de l’Afrique ». Elle renchérit : « Dans cette entreprise de reconquête et de reconstruction de l’image de l’Afrique, je ne connais aucune arme plus puissante, plus redoutable que la photographie parce que photographie signifie littéralement écrire avec la lumière. »
Ainsi, les Rencontres de Bamako, initiées en 1994, constituent une « véritable plateforme de visibilité pour les artistes photographes et vidéastes d’Afrique et de ses diasporas ». Car, elles ont contribué à développer la carrière artistique chez un grand nombre de photographes africains. Du coup, le thème ‘’Courants de conscience’’ se déploie comme « une métaphore littéraire appelant à une réflexion profonde, lyrique et attirante sur l’art photographique ». Il englobe « la notion de dialogue entre le continent et ses diasporas dispersées dans le monde entier », détaille Mme le Ministre de la Culture.
Fortuné SOSSA