Auditrice du 3ème Cours francophone sur l’apatridie et la nationalité organisé par l’Unhcr et l’Ucac/Icy, Marie Louise Félicité Bidias, procède ici à une restitution des notions acquises. C’est à la faveur du club presse Café médias plus n° 319. Son message sonne comme une alerte.
« Quatre millions deux cents mille apatrides dans quatre-vingt-quatorze pays dans le monde dont un millions six cents mille dans la région ouest africaine. » Des chiffres alarmants sur le phénomène de l’apatridie.
Marie Louise Félicité Bidias, journaliste professionnelle, en parle avec beaucoup d’émotion. C’est à la suite de sa participation au 3ème Cours francophone sur l’apatridie et la nationalité, du 26 au 30 juillet 2021, grâce au Bureau régional de l’agence des Nations Unies pour les réfugiés (Unhcr) pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre et l’Université catholique d’Afrique Centrale (Ucac)/Institut catholique de Yaoundé (Icy).
Au terme de l’exposé de la journaliste le 13 août au Café médias plus sur le thème ‘’Apatridie : Définitions et implications’’, il ressort qu’un apatride est « une personne qu’aucun Etat ne considère comme son ressortissant par application de sa législation ». Toutes les dix minutes, rapporte Marie Louise, « un enfant nait apatride dans le monde ». Ce qui justifie que plus d’un tiers des apatrides sont des enfants. Pire, plus de la moitié des apatrides sont des femmes et des enfants.
Les causes de l’apatridie, explique-t-elle, sont, entre autres, relatives aux « défaillances législatives ». Exemple des conflits de lois, de la règlementation sur la fin de la nationalité, de la discrimination législative, de la citoyenneté communautaire…
Au niveau de la citoyenneté communautaire, le risque d’apatridie apparait assez vite. Il suffit de se référer au Code de citoyenneté de la Cedeao datant de 1982. Il stipule en son 1er article ce qui suit : « Est citoyen de la Cedeao toute personne naturalisée d’un Etat membre qui renonce expressément à la nationalité d’un Etat non membre ». Il y a risque d'apatridie si la déchéance ultérieure de la nationalité acquise est sans possibilité de recouvrir la nationalité d’origine.
Les défaillances du système de l’état civil en constituent par ailleurs une cause. Marie Louise Félicité Bidias justifie : « L’absence de modernisation de l’état civile et la mauvaise conservation des registres d’état civil peut entrainer la perte, la destruction des données sur l’identité d’une personne. Non sans oublier l’analphabétisme, l’ignorance, la négligence, la pauvreté, les croyances et les mentalités rétrogrades. Ce qui peut entraîner le défaut d’enregistrement des naissances, d’où un risque d’apatridie enfantine. »
Fort heureusement, il existe un cadre international de l’attribution de la nationalité aux enfants trouvés. Confère l’article 2 de la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie qui précise : « L’enfant trouvé sur le territoire d’un Etat contactant est, jusqu’à preuve du contraire, réputé être né sur le territoire de parents possédant la nationalité ». Cependant, plusieurs législations accordent uniquement la nationalité aux enfants « nouveau-nés » trouvés. Du coup, il existe un risque d’apatridie pour les enfants qui ne sont pas des nouveau-nés.
Au regard de l’ampleur du phénomène, une campagne a été lancée en novembre 2014 à l’effet d’y mettre fin ou de le réduire considérablement dans le monde à l’horizon 2024, en résolvant les situations existantes et en prévenant l’apparition de nouveaux cas. Les médias aussi ont un rôle prépondérant à jouer dans cette lutte contre l’apatridie.
Le 3ème Cours francophone sur l’apatridie et la nationalité a regroupé des participants originaires de toute l’Afrique francophone, de la France et des Etats-Unis. La formation s’est déroulée en quatre modules : nationalité, apatridie, facteurs d’apatridies et risques d’apatridie et la protection internationale des apatrides. Elle a été dispensée en ligne par vingt formateurs au nombre desquels des professeurs d’universités, des experts et des cadres de l’Unhcr en provenance du Bénin, du Burkina Faso, du Cameroun, de la Côte d’Ivoire, du Sénégal, de la France, de la Suisse, de la Hongrie et de l’Australie.
Fortuné SOSSA